top of page

Évaluer?

C'est quand je leur ai dit que leur texte ne pouvait contenir plus de 500 mots que les protestations ont commencées. «500 mots ! Mais on n'y arrivera pas madame : c'est pas assez !» Les bras m'en sont tombés; disons que je m'attendais plus à : « 500!!!! C'est beaucoup trop loooooong». C'est vrai qu'on a beaucoup écrit cette année, que les élèves se sont améliorés...


Les élèves se sont rapidement mis au travail. Ils devaient écrire un récit pour le concours de littérature de notre Commission Scolaire. Je leur ai laissé le choix de l'univers, car leur imagination est débordante quand on leur laisse l'exploiter. Puis ce fut la terrible étape de la correction. Cette fois, aucune protestation. Ils sont tous malades? Ça doit être parce qu'on a travaillé directement sur traitement de texte et que les élèves utilisent Antidote de plus en plus efficacement... Mais ce n'était pas ça la vraie raison... J'ai vu des garçons se battre avec Antidote pour ne plus avoir de rupture de phrases, ceux-là même dont les enseignantes de l'année dernière m'avaient dit qu'ils détestaient écrire. On m'a posé des questions pour mieux comprendre la façon de faire certains accords. J'ai vu des élèves de 5e et 6e année travailler des heures pour améliorer et corriger leur texte. J'ai vu des élèves avoir du plaisir à écrire... J'ai vu des élèves faire des efforts... J'ai vu des élèves faire lire leur texte à un ami pour avoir un conseil... J'ai vu des élèves apprendre.


Au moment de me remettre leur texte, j'ai entendu des merveilles. Plusieurs m'ont dit que c'est le meilleur texte qu'ils ont écrit de l'année, voire de leur primaire. J'ai vu de la fierté dans leurs yeux. J'ai vu la satisfaction de remettre leur oeuvre pour que je la lise. Plusieurs avaient même bon espoir d'avoir écrit LE texte qui réprensenterait la classe au concours.


Et voilà que résonne la question : «On vas-tu avoir une note pour ça ?». J'ai évité de répondre, possiblement sauvée par une des rares cloches que l'on n'a pas encore abolie dans mon école... Honnêtement, je ne voulais pas évaluer ces textes. Non, je ne pouvais pas évaluer ces textes! J'ai eu trop peur de tuer à grand coup de stylo la fierté si méritée de mes élèves (car les textes sont en général très bons), de faire disparaître le plaisir qu'ils ont eu à écrire. Je me voyais mal dire à celui qui m'a avoué, les yeux brillants, phénomène assez rare chez un gars de 12 ans, qu'il vient d'écrire son meilleur texte de l'année, que selon une grille inspirée du MEESR son travail ne vaut possiblement que 65% alors qu'il y a mis 110% d'effort. Alors des notes, ils en auront une autre fois ! Aujourd'hui, on va fêter les réussites!


Alors, j'ai lu tous les textes, et sur une autre feuille ( je n'ai même pas osé écrire directement sur leurs textes), j'ai écrit des commentaires à mes élèves. Je leur ai dit ce que j'aimais de leur texte, j'ai souligné leur amélioration... et c'est tout.


J'ai remis les copies. Ils ont lu ce que j'ai écrit. J'ai vu des sourires.

Ai-je un gagnant pour le concours ? Oui, et le texte est une pure merveille croyez-moi. Reste à couper 12 mots pour qu'il n'en fasse que 500. Mais j'ai surtout 24 élèves qui ont gagné en confiance en leur capacité d'écrire et ça, ça vaut bien plus que tous les pourcentages du monde.

SEARCH BY TAGS:
Pas encore de mots-clés.
bottom of page